Attention aux requins sur les étals de poissonniers !
On trouve assez fréquemment du requin sur les étals de marché. Difficile de se fier aux vendeurs, qui sont rarement des spécialistes des poissons qu’ils sont censés vendre. Alors, attention aux requins sur les étals de poissonniers ! N’hésitez pas à interroger les commerçants. Théoriquement, ils doivent être en mesure de vous donner le nom scientifique de l’espèce et le lieu de pêche, voire le moyen utilisé pour la pêche.
Sachez que l’Inventaire des espèces menacées en France classe la Saumonette, le Chien de mer et le Veau de mer sur la liste rouge des espèces en danger.
La Roussette ou Saumonette
La saumonette est un nom commercial. On le donne à plusieurs petits requins ayant été écorchés et présentant une chair rosée rappelant celle du saumon. Le poisson, lui, s’appelle la roussette. Il en existe plusieurs espèces. C’est un poisson plutôt bon marché. Il est presque sans déchets car toujours vendu dépouillé. Sa chair a une saveur douce, voire fade. Elle a connu un certain succès dans la restauration collective car la roussette n’a pas d’arêtes.
La petite roussette (Scyliorhinus canicula) mesure entre 40 et 80 cm. Bien que de moins en moins fréquente sur les étals, elle n’est pas considérée comme menacée et sa pêche est autorisée. Quant à la grande roussette (Scyliorhinus stellaris), c’est un petit requin qui peut atteindre 2 m de long. Désormais, elle est classée Vulnérable par l’UICN et sa pêche est règlementée. À noter que les roussettes possèdent une peau rugueuse, utilisée jadis un peu comme un papier de verre pour travailler le bois ou tanner le cuir.
L’Aiguillat commun ou Chien de mer
L’aiguillat commun (Squalus acanthias) ou aiguillat tacheté est surnommé « chien de mer ». Ce petit requin au corps mince et allongé gris-brun foncé dispose de deux bandes plus claires tachetées de points blancs sur son dos. Le mâle adulte pèse 4 kg et mesure jusqu’à un mètre de long alors que la femelle peut atteindre 1,30 m. C’est lui que l’on retrouve dans les fameux Fish & Chips britanniques. Sa chair est blanche, grasse et tendre, vendue en filets, à l’état frais ou congelé. Elle est très appréciée fumée. La dernière estimation de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) concernant l’aiguillat commun date de 2019. L’UICN le classe comme étant « vulnérable » au niveau mondial. Sa pêche en France est interdite.
Le Veau de mer ou requin-taupe
Le requin-taupe ou Veau de mer, ou encore Maraîche (Lamna nasus) est une espèce en danger. C’est un grand poisson – qui peut atteindre 3,5 mètres – dont la chair rose est appréciée des cuisiniers. Sa population a décliné au moins de 60 % dans l’océan Atlantique depuis les années 1950. Afin d’assurer sa protection et sa préservation, des règles spécifiques s’appliquent à son commerce et à sa commercialisation dans l’Union européenne. En l’occurrence, sa pêche y est interdite. On retrouve pourtant l’appellation « Veau de mer » fréquemment sur les étals de poissonniers. Mais cela ne correspond pas forcément à l’espèce concernée…
Un outsider : le requin renard
Quant au Requin renard (Alopias vulpinus), si sa pêche ciblée est interdite, les captures accidentelle sont tolérées. L’espèce est classée Vulnérable par l’UICN. Sur la photo, c’est en connaissance de cause que le vendeur me parle de requin renard, m’assurant que sa pêche est autorisée. Pourtant, sur son étal, rien n’indique l’espèce du poisson dont la tête est posée comme un trophée pour attirer le chaland. En revanche, l’étiquette de « Veau de mer » est, elle, bien là, prêtant à confusion. Il ignore que la pêche du requin-taupe (Lama nasus) est interdite.
Victimes de la surpêche
La plupart des requins proposés sur les étals de poissonniers sont donc des espèces menacées dans les eaux de France métropolitaine. Les émissoles tachetées, lisses et pointillées, et la petite roussette, considérées comme présentant un faible risque de disparition, ne sont pas soumises à une interdiction de pêche. Quoiqu’il en soit, c’est à vous – à nous tous – en tant que consommateurs de devenir acteurs de notre consommation pour le plus grand bien de notre planète. Alors, attention aux requins sur les étals des poissonniers !