La Réunion : le requin tigre rapporte gros
On le dit, on le répète : le requin tigre (Galeocerdo cuvier) est une espèce menacée d’extinction. Pourtant, il reste une cible de la pêche dite de « sécurisation » à La Réunion alors qu’il n’est responsable que d’un accident mortel en 20 ans. Alors, est-ce parce que la pêche au requin tigre rapporte gros ?
Un requin facile à capturer sur appât
Si le requin tigre a mauvaise réputation, il reste un requin « facile » à attraper : il suffit de l’appâter. C’est d’ailleurs déconcertant de noter que les palangres appâtées du Centre Sécurité Requin (CSR) sont toutes installées sur la côte ouest de l’île. Précisément là où la fréquentation touristique bat son plein. Alors peut-on parler de « pêche de sécurisation » quand on pose des appâts à requins là où l’on pratique des activités nautiques ? Ou veut-on préserver les subventions perçues pour cette « pêche de sécurisation » en affichant des résultats de pêche, ce qui ne peut se faire que par la pêche au requin tigre ? Car la pêche au requin rapporte gros à La Réunion… .
L’effort de pêche en question
En effet, quand on observe les chiffres publiés par le CSR, les captures de requins tigres sont 8 fois supérieures à celles de requins bouledogues. Et c’est grâce à ces captures que les « élus » (pêcheurs, CSR, Comité des pêches de la Réunion) continuent de percevoir de généreuses subventions. Aucune pêcherie privée ne pourrait se permettre un si faible rendement : autant d’heures de pêche pour des résultats aussi minables. Economiquement minables, écologiquement catastrophiques. Et ce faible rendement de pêche ciblée est tout bonnement lié à l’absence de squales… Quant à la valorisation économique de cette pêche, cela relève du fantasme politicien !
Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Premièrement, les eaux autour de la Réunion n’ont jamais été infestées de requins. A l’inverse de ce que les bénéficiaires des subventions veulent faire croire depuis 2012. Deuxièmement, les requins tigres sont systématiquement attirés et tués (sauf quand ils arrivent à s’échapper !). Précisons que seuls deux requins bouledogues ont été pêchés en 2022. Donc, même si le requin tigre n’est pas responsable des accidents, en tant qu’espèce cible, il permet de justifier du montant des subventions versées.
Avis UICN et décisions de la CITES pro-requins
En mars 2022, le Comité français de l’UICN a exprimé une position officielle appelant à la mise en place de politiques de prévention non létales du risque requin.
En novembre 2022, la 19e conférence des parties de la CITES a voté l’inscription des 54 espèces de requins de la famille des Carcharhinidés en annexe II de la Convention de Washington, dont le requin bouledogue. Cela implique une forte régulation dès février 2023 de la pêche de ces requins.
Récemment déclassé de la famille des Carcharhinidés, le requin tigre n’en reste pas moins une espèce menacée dans son environnement. Par conséquent, les associations de protection de l’environnement et de la biodiversité marine demandent encore une fois que le requin tigre soit retiré des espèces cibles de la « pêche de sécurisation » à La Réunion. Malheureusement, jusqu’à présent, les autorités n’ont pas accédé à cette demande pourtant argumentée de façon sérieuse. Là encore, il y a de quoi s’interroger : puisque le requin tigre n’est pas impliqué dans la grande majorité des accidents mortels, pourquoi ce refus de le retirer des espèces cibles ? Est-ce encore une fois une question d’argent ? On aimerait savoir qui sont tous les bénéficiaires desdites subventions…
Commentaires récents