Cop19 de la CITES à Panama : décisions historiques
14-25 novembre 2022
Selon l’UICN, 19 espèces de requins de la famille des Carcharhinidés sont en danger CRitique d’extinction ou EN danger. Egalement en danger, les requins-marteaux et les raies-guitares et des raies d’eau douce. Cela signifie que ces espèces sont confrontées à un risque extrêmement ou très élevé d’extinction à l’état sauvage.
Pour rappel, l’Annexe II de La CITES comprend toutes les espèces qui ne sont pas nécessairement menacées d’extinction mais dont le commerce des spécimens doit être réglementé pour éviter une exploitation incompatible avec leur survie. L’Annexe I, quant à elle, interdit complètement le commerce de certaines espèces. Les pays-membres de la CITES sont au nombre de 183.
Proposition d’inscription n°37 à l’Annexe II des Carcharhinidae spp.
La proposition d’inscription à l’Annexe II de la CITES de ces 19 espèces a été soumise à la 19ème Conférence des Parties (COP19) par le Panama, le Bangladesh, la Colombie, la République dominicaine, l’Equateur, El Salvador, l’Union Européenne, le Gabon, Israël, les Maldives, le Sénégal, les Seychelles, le Sri Lanka, la République arabe syrienne, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.
Ainsi, cette demande concerne notamment le requin gris de récif (Carcharhinus amblyrhynchos), le requin sombre (C. obscurus), le requin tiqueue (C. porosus), le requin du Gange (G. gangeticus), le requin gris (Carcharhinus plumbeus), le requin de Bornéo (Carcharhinus borneensis), le requin-baliai (Carcharhinus hemiodon), le requin Carcharhinus leiodon, le requin-citron faucille (Negaprion acutidens), le requin de récif (Carcharhinus perezi), le requin bécune (Isogomphodon oxyrhynchus), le requin Carcharhinus signatus, le requin nez blanc (Nasolamia velox), le requin nez noir (Carcharhinus acronotus), le requin à joues blanches (Carcharhinus dussumieri), le requin Carcharhinus obsoletus, le requin Carcharhinus cerdale, le requin Lamiopsis tephrodes et le requin Lamiopsis temminckii.
A ces 19 espèces s’ajoute l’inscription des 35 autres espèces de la famille des Carcharhinidés, soit 54 espèces au total, pour des raisons de ressemblance et d’impossibilité de distinction visuelle et d’identification immédiate.
Proposition d’inscription n°38 pour les requins-marteaux
Une autre proposition déposée par la Colombie, l’Équateur, l’Union européenne et le Panama demande l’inscription de Sphyrna tiburo, communément appelé requin-marteau tiburo, espèce classée EN danger. Le document propose également l’inscription en Annexe II de toutes les autres espèces de la famille des Sphyrnidae (requins-marteaux) qui ne sont pas déjà inscrites à l’annexe II de la CITES, dont: Sphyrna media, Sphyrna tudes, Sphyrna corona, Sphyrna gilberti, et Eusphyra blochii, ainsi que de toute autre espèce non encore identifiée de la famille des Sphyrnidae.
Proposition d’inscription n°39 pour deux espèces de raies endémiques du Brésil
Le Brésil a demandé l’inscription à l’Annexe II de Potamotrygon wallacei et Potamotrygon leopoldi, deux espèces de raies à croissance lente, à maturation sexuelle tardive et à faible fécondité, ce qui les rend vulnérables. Par ailleurs, la dégradation de l’habitat par déforestation, incendies de la forêt amazonienne, construction et exploitation de centrales hydroélectriques, expansion agricole, et pêche pour l’alimentation ou le marché des poissons d’ornement, sont des menaces qui peuvent entraîner une régression des populations.
Proposition d’inscription n°40 pour les raies-guitares
De plus, Israël, le Kenya, Panama et le Sénégal ont proposé d’inscrire la famille des Rhinobatidae (raies-guitares) à l’Annexe II, soit 37 espèces de raies-guitares. Sur ces 37 espèces, 35 d’entre elles sont en déclin : 23 sont En danger et 10 sont en danger CRritique d’extinction selon la Liste rouge des espèces menacées de l’UICN.
La proposition vise donc l’inscription en Annexe II des six espèces en danger critique d’extinction suivantes : Acroteriobatus variegatus, Pseudobatos horkelii, Rhinobatos albomaculatus, Rhinobatos irvinei, Rhinobatos rhinobatos, Rhinobatos schlegelii.
Cela étant, l’identification des parties et produits de poissons-guitares dans le commerce étant difficile, la présente proposition vise à inscrire toutes les autres espèces de la famille des Rhinobatidae à l’Annexe II.
Des propositions devant être approuvées par la Session plénière
Pour être adoptées, les propositions devaient atteindre la majorité des deux tiers des gouvernements présents. Toutes les propositions d’inscription devaient également être approuvées par la session plénière de la COP lors des deux derniers jours, soit les 24 et 25 novembre 2022.
Selon une lettre ouverte des ONG MarViva, Shark Project, Shark Defenders et SOA Pérou : « si les résolutions sont approuvées en plénière par la conférence, « le commerce des ailerons (de ces espèces) ne sera possible que si leur commerce est durable ». Les gouvernements devraient ainsi « mettre en place et respecter des mesures effectives dans toutes les pêcheries visant à arrêter la surpêche et à restaurer les populations surexploitées ». Pour mémoire, le marché des ailerons de requins, dont le centre est à Hong Kong, dépasse le demi-milliard de dollars par an (483 millions d’euros). Les ailerons peuvent se vendre 1.000 dollars le kilo en Asie de l’Est.
Propositions n°37, n°38, n°39, n°40
La proposition n°37 présentée le 17/11/2022 demandait l’inscription des 54 espèces de requins de la famille des Carcharhinidés. Le débat a duré près de trois heures. Le Japon et le Pérou ont proposé d’exclure certaines espèces des mesures de protection, ce qui a été rejeté lors d’un vote à bulletin secret par 88 voix contre 29 et 17 abstentions. La session plénière a approuvé cette décision. Cela implique une forte régulation à venir de la pêche de ces 54 espèces.
La proposition n°38 concernant les requins-marteaux a été adoptée par consensus le 17/11/2022 et a été approuvée lors de la session en plénière.
La proposition n°39 pour les raies Potamotrygon wallacei et Potamotrygon leopoldi a également été approuvée en session plénière.
La proposition n°40 pour la famille des poissons-guitares
Le 18/11/2022, l’inscription de cette familles de poissons appelés « poissons-guitares » ou « raies-guitares » a été adoptée par 101 voix pour, 14 voix contre et 13 abstentions et approuvée en session plénière.
En conclusion…
Ce sont de bonnes nouvelles qui témoignent d’une prise de position mondiale en faveur des requins et des raies. Un changement bénéfique donc dans l’approche et le respect de ces espèces et de l’environnement marin. Comme le titrent plusieurs médias, ce sont des « décisions historiques ».
Cela étant, une fois ces amendements adoptés, un délai de 12 à 18 mois avant leur application est accordé aux pays-membres, auxquels il incombe de prendre les mesures de contrôle nécessaires. Il nous reste à croiser les doigts et à oeuvrer auprès de nos gouvernements pour que ces sages décisions ne restent pas lettre morte et passent du stade de papier à la concrétisation sur le terrain.
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