La Réunion: le projet CHARC pour étudier le « risque requin »
Suite aux accidents qu’a pu connaître la Réunion, la décision d’étudier les causes de ces attaques a été prise.
Ainsi, deux projets coexistent : le projet CHARC (Connaissances de l’écologie et de l’HAbitat de deux espèces de Requins Côtiers sur la côte ouest de la Réunion) subventionné par des fonds publics et mené par l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) et le projet de « taggage » financé par des fonds privés collectés auprès des professionnels de la mer et des commerçants de l’île et soutenu par la FFESSM (Fédération Française d’Etudes et de Sports Sous-Marins).
L’objectif de CHARC est d’étudier l’écologie du requin tigre (Galeacerdo cuvier) et de requin bouledogue (Carcharhinus leucas), 2 espèces de requins familiers de La Réunion, de définir les caractéristiques de leurs habitats respectifs et de leur distribution spatio-temporelle. Les résultats de ces recherches subventionnées sont attendus par tous les acteurs politiques et économiques de l’île. Ainsi, le projet CHARC a été lancé le 18/10/2011. La 1ère phase de ce projet est le marquage électronique des requins. La durée prévue de cette étape est de 4 mois, à raison de 2 sorties en mer par semaine pour effectuer la pose de balise sur les requins éventuellement repérés. Les deux bateaux mandatés par la préfecture pour procéder au marquage des requins ont effectué le taggage d’un premier requin tigre de 2,50 mètres au large du Cap Lahoussaye en octobre. La méthode choisie par les scientifiques est de sortir le requin de l’eau et de le retourner sur le dos, puis de pratiquer une légère incision au niveau de l’abdomen afin d’y placer la balise acoustique interne. La plaie est ensuite suturée par quelques points. Dernière étape avant le relâcher : poser une deuxième balise visuelle sur l’aileron dorsal. En totalité, la manoeuvre dure près d’une heure. A mi-décembre 2011, quatre requins tigres et un requin bouledogue ont été marqués par l’équipe du projet CHARC.
Avant de pouvoir relever les données, il est nécessaire d’installer des balises acoustiques près des côtes, au fond des baies, là où les requins sont supposés passer le plus souvent. Tous les passages à proximité de la balise des requins marqués sont enregistrés par l’appareil. Les données seront ensuite analysées par les scientifiques. Les résultats de ces observations serviront d’une base d’étude destinée à mieux comprendre les déplacements des requins à la Réunion et à mieux prévenir le risque d’accidents. Au 15 décembre, quatre balises acoustiques sur 10 ont été installées et sont opérationnelles.
La 2e phase du projet CHARC, commencée le 15/12/2011, est une phase d’étude de toutes les données liées aux accidents à la Réunion depuis 1980 et autres statistiques et documents existants et relatifs aux requins, plus particulièrement au requin tigre et au requin bouledogue. Au total, la durée du projet CHARC est de 2 ans et demi (30 mois).
En parallèle, une autre opération de marquage électronique (« taggage ») a commencé mi-novembre avec les apnéistes Frédéric Buyle et William Winram. L’opération privée se fait en apnée, les requins restent donc dans leur espace naturel. La méthode est moins invasive pour l’animal, mais réservée à des spécialistes. Le tag est tiré avec une arbalète de chasse sous-marine. Dix balises sont à poser sur les ailerons des requins. Jean-Marc Charel, le trésorier du Comité Régional de la Fédération de Plongée, a déclaré : « Nous sommes actuellement en train de discuter avec la préfecture de la manière dont on doit s’organiser pour ne pas se gêner. Nous respectons tout à fait les porteurs du projet CHARC. De plus, le matériel utilisé est le même et donc toutes les données recueillies pourront être rassemblées pour être analysées par les scientifiques de l’IRD ».
L’objectif commun de ces projets sont l’étude des déplacements des requins tigres et des requins bouledogues, ainsi que l’étude des caractéristiques de leur population et de leur habitat afin de contribuer à une meilleure gestion du risque requin à la Réunion, de sensibiliser les acteurs socio-économiques de l’île pour engager la Réunion dans la politique européenne de protection et de conservation de ces espèces.
CHARC s’inscrit dans la perspective de l’agenda 21 (Rio, 1992) de gestion durable des écosystèmes. Les chercheurs qui participent à ce projet développent depuis de nombreuses années, dans l’ouest de l’océan Indien, une approche écosystémique afin de mieux connaître les mécanismes expliquant la vulnérabilité et la résilience des écosystèmes régionaux. Le but est de mieux expliquer la place et le rôle des différentes espèces de la faune océanique et de proposer des voies de gestion durable des écosystèmes marins en conciliant conservation et exploitation durable des ressources.